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Mai 1916 : Nos Poilus empruntent la « Voie sacrée »

04/04/2016
Mai 1916 : Nos Poilus empruntent la « Voie sacrée »

Comme nous l’avons vu le mois dernier, Amable GUEIDON a été relevé du front pour partir au repos le 2 mai dans la région de Bar-le-Duc, au sud de Verdun. Pour cela il a embarqué dans l’un des nombreux camions qui assurent la « noria » entre la zone des combats et l’arrière en empruntant la célèbre « Voie sacrée ».


Comme lui, tous nos Poilus boucains combattants de Verdun sont montés vers le « Golgotha meusien », selon l’expression de l’historien Jean-Yves le Naour, en empruntant cette route empierrée qui aura nécessité plus de 700 000 tonnes de cailloux pour être entretenue pendant 10 mois. Tout juste carrossable, elle fait 7 m de large et 65 kms de long entre la gare de Baudonvillers à Bar-le-Duc et le lieudit du « Moulin brulé » à 8 kms de Verdun. Comme Amable ils en sont aussi redescendus pour un repos bien mérité à l’abri des bombardements, tous ou presque puisque certains d’entre eux y laisseront leur vie.

Etienne BERENGER, Louis BERNADOU, Léopold BERNARD, Joseph BOUCHET, Edouard BOUQUET, Marceau DAUSSAN, Jean-Marie GABELIER, Jules OLIVIER, Antoine PANELLI, Gaston POLGE, Emile SAMAT et Marius SIBILOT auront fait partie des 20000 soldats qui ont transité quotidiennement sur cet axe vital aux côtés des 2000 tonnes de munitions. Ils sont serrés dans les caisses des camions comme des bestiaux que l’on mène à l’abattoir. Ils débarquent au carrefour du « Moulin brûlé » pour parcourir souvent de nuit la dizaine de kilomètres qui leur reste à faire pour rejoindre les tranchées, ployant sous le poids de leur barda. Ils croisent dans l’autre sens les « troupes descendantes », ivres de fatigue et totalement abruties par les bombardements incessants.


Sur cette route ce sont 8000 véhicules qui se succèdent toutes les 14 secondes, chaque jour de la semaine et 24 heures sur 24. Tout est parfaitement orchestré, minuté pour éviter tout embouteillage et toute rupture logistique. Tout véhicule en panne est immédiatement poussé dans le fossé pour ne pas ralentir le flux. Les vitesses sont définies avec précision en fonction du type d’engin : 4km/h pour l’artillerie, 15km/h pour les camions et 25 km/h pour les camionnettes.


Dans le livre « Un Pékin sur le front » on peut lire au sujet des conducteurs : « Des nuits et des nuits, ils restent rivés à leur volant, brisés de fatigue, dans une immobilité qui les ankylose, mangeant comme ils peuvent un morceau, d’une main gonflée d’engelures, enduite de vaseline glacée, pendant que l’autre main continue machinalement à conduire, obligée de farfouiller à chaque instant cette ferraille nerveuse- luttant contre le froid, luttant surtout contre le sommeil opiniâtre, despotique, torturant, qui les assaille au fond de ces capotes closes, où ils ne voient rien dans le bercement irrésistible du perpétuel ronron du moteur… »